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décembre 10, 2015

Peur, désinformation et courage !!

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.


 
Notre pays vit une période singulière et sordide de paranoïa aigue. Quand nous ne sommes pas angoissés par tous les maux de la planète véhiculés par nos médias, nous sommes harcelés par les cours de morale assénés par nos politiques. Le niveau de peur distillé et le lavage de cerveau ambiant sont devenus tout simplement ahurissants au regard de la réalité et insupportables pour une démocratie comme la nôtre. Pourtant, nous ne manquons pas de moyens d’information, mais il faut admettre que les niveaux de prise de recul sur l’actualité et de discernement sur la nature des risques que nous avons à assumer sont devenus consternants. Nous sommes de plus en plus dans le commentaire sur les plateaux TV, le suivisme dans les couloirs des décideurs et le fatalisme au sein de la population1

Nous avons l’impression d’être entrés dans le temps des calamités et surtout dans un modèle de société où il n’y a plus de raison d’espérer quoi que ce soit du présent et encore moins de l’avenir... Étonnante atmosphère dans laquelle nos clercs, affublés d’une meute d’imposteurs et de petits communicants, distillent au quotidien ces doses médicamenteuses de peurs et de désinformations qui inhibent inexorablement toute capacité de jugement et tout esprit critique. Cela leur permet de pouvoir gouverner en toute impunité et de maintenir les populations dans des biais de représentation qui s’avèrent malsains et de plus en plus mortifères. Certes, le monde se transforme à très grande vitesse et ne nous attend pas. Nous pourrions même préciser qu’il ne nous attend plus depuis longtemps! C’est regrettable, mais c’est ainsi et il serait temps de l’admettre plutôt que de le craindre inconsidérablement. Il se pourrait même qu’il soit un peu tard... Comme l’écrit Cocteau : « L’avenir n’appartient à personne, il n’y a pas de précurseurs, il n’y a que des retardataires ». En ce qui nous concerne, nous pourrions ajouter qu’il y a aussi « des agités et des perdants ». 

Il est convenu désormais de parler d’un « monde chaotique », sans trop savoir ce que l’on met derrière cette assertion. Cela permet à de nombreux experts, aux tonalités plus ou moins apocalyptiques, d’occuper la scène médiatique sur tout et n’importe quoi : de l’Ebola à l’Islamisme en passant bien entendu sur le plan géopolitique par les deux figures incontournables que sont devenus les deux pestes russes et syriennes... « Quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage... ». Cela évite de traiter nos véritables pathologies et ces cancers qui rongent de l’intérieur nos sociétés avec l’endettement et la faillite de l’Etat, le niveau du chômage et la perte réelle de compétitivité de nos économies, les radicalisations identitaires et religieuses, le désenchantement et la désespérance qui frappent nos populations... « Divide ut regnes2 » s’accorde très bien en termes de gouvernance avec peur et désinformation. 

Si nous nous référons à sa racine grecque, le terme chaos signifie « béance ». Dans la mythologie grecque, il s’agit de l’état initial qui précède l’origine du monde et l’arrivée des dieux3. Sans cette cause première, ou principe premier selon les écoles philosophiques, la matière ne peut pas se mettre en mouvement ni se transformer. Si nous restons fidèles à cette approche, il est clair que le monde vit depuis un demi-siècle une transformation considérable, voire radicale, des rapports de force et de puissance. Ces derniers en s’exprimant de plus en plus en dehors de notre rationalité et malgré nous, génèrent dans nos perceptions cette sensation de chaos. Mais ce que nous ressentons dans nos sanctuaires de riches comme l’émergence d’un désordre démoniaque n’est pas perçu de la même façon dans le reste du monde. Au contraire le reste de la planète considère cette phase de transition de l’Histoire comme une formidable opportunité pour s’imposer de nouveau dans les jeux d’acteurs. Avoir peur de la « béance » générée dans l’ordre du monde par ces transformations, ces changements de paradigmes, dont nous avons souvent été et paradoxalement à l’origine, ne changera strictement rien aux risques que nous devons anticiper et assumer si nous voulons espérer être dans les nouveaux jeux de demain. 

Au lieu d’essayer de transformer le présent et d’anticiper l’avenir, tout est désormais prétexte pour haranguer nos populations sur ces crises fatales qui nous submergent, ces acquis historiques qu’il faut défendre de façon suicidaire, ces méchants dirigeants à nos frontières qui n’obtempèrent pas à nos ultimatums et qui nous veulent forcément du mal. Ces peurs nous maintiennent en état de sidération et nous enferment petit à petit dans des formes de schizophrénie collective inquiétante qui expliquent les types d’implosion que nous constatons dans nos sociétés. Tout ceci nous maintient dans un infantilisme préoccupant et surtout dans un niveau de confusion et de soumission qui est assez inédit. Il est plus que temps de nous réveiller et de nous ressaisir pour aborder avec un peu plus de lucidité et de robustesse les rendez-vous qui sont devant nous. Il est également temps d’arrêter de nous saturer avec de fausses peurs et de nous prendre en permanence quotidiennement pour des imbéciles avec de faux problèmes. 

Nous savons que le monde que nous avons connu, celui qui a été façonné par le traité de Westphalie, redessiné par le traité de Versailles et sanctuarisé par Yalta est définitivement mort depuis plusieurs décennies. Certes, depuis 20 ans nous essayons de freiner la déconstruction de la matrice qui nous a assuré plusieurs siècles de maîtrise de l’Histoire. Les choses s’accélèrent ou du moins deviennent plus explicites. Mais nous refusons de les voir telles qu’elles sont. Nous pratiquons le déni. Les évènements en Ukraine, en Syrie, au Sahel, sans oublier ce qui se joue en mer de Chine, sont normaux. Ils ne font que s’inscrire dans ce lent processus de redécoupages identitaires et territoriaux que nous constatons sur toutes les lignes de tension civilisationnelle depuis les évènements du Liban, puis de l’ex-Yougoslavie, bien au-delà la chute du mur de Berlin et la désanctuarisation de l’Europe centrale. Cela commence toujours par des guerres civiles autour de questions identitaires, se poursuit avec des logiques séparatistes pour déboucher sur de nouvelles frontières. C’est la fin de tous les avenants du traité de Versailles4 notamment ceux de Sèvres5 et de Lausanne6 dans les Balkans et sur les marges orientales de l’Europe, c’est aussi la fin des accords Sykes-Picot7 au Levant et au Moyen-Orient, la fin de Balfour8 sur Israël avec l’inévitable reconnaissance de l’Etat palestinien, voire de façon sous-jacente la fin du pacte du Quincy9 avec la remise en cause de la donne énergétique au niveau mondial. Mais c’est aussi le retour des grands « empires centraux »10 avec la Turquie d’Erdogan, la Sainte Russie du tsar Poutine, la grande Perse, les deux puissances nationalistes que sont l’Inde sur l’Océan indien et le Japon sur le Pacifique nord, sans oublier la Chine qui a l’intention de redevenir dans les dix à vingt ans la première puissance mondiale, ce qu’elle fut déjà pendant des siècles! L’Histoire ne fait que reprendre ses droits et sa marche en avant. 

Pour conserver l’illusion d’un semblant de puissance et tenter de verrouiller nos facteurs de bien-être, nous nous sommes résignés à ne devenir qu’une petite pièce de l’incontestable surpuissance américaine, dont l’omnipotence sécuritaire repose sur une dette gigantesque et sur cette arme de destruction massive qu’est le dollar. Cet alignement nous oblige désormais à fondre nos intérêts dans la redéfinition de nouveaux jeux d’alliances et dans des traités de libre-échange qui ne sont pas soumis aux peuples. Pour cela, il nous faut accepter de nommer des adversaires, d’affirmer des menaces et d’accepter les standards anglo-saxons comme modèle absolu de vie et de pensée. Pour conserver notre statut et surtout notre niveau de vie, il nous faut obtempérer aux consignes des lobbies de Washington et nous soumettre à une lecture du bien et du mal assez simpliste. Il est évident que dans ce contexte des dirigeants comme Vladimir Poutine ou Bachar el Assad, voire des concepts comme l’islamisme, deviennent des boucs émissaires faciles à diaboliser pour tétaniser et conditionner les populations. Il est également clair qu’un contrôle total des systèmes d’information et de communication11 est devenu indispensable afin que la matrice puisse tenir face aux remises en cause des jeux de puissance, aux masses critiques en mouvement sur les plans démographiques, financiers et économiques ainsi qu’aux risques de fractalisation qui s’affirment de façon inexorable aux marges de l’Occident. 

C’est de bonne guerre ! Nos adversaires ne s’y prendraient pas autrement pour nous dominer, mais peut-être que dans le passé nous fumes un peu plus subtils et furtifs dans la manœuvre et moins pressés... Maintenant, il faut le reconnaître, les « castings » politiques n’étaient pas non plus du même niveau... Pour arriver à cette finalité, tout est bon, de l’instrumentalisation permanente des peurs ordinaires, en passant par l’Ebola, jusqu’à la réanimation des concepts de la « guerre froide » pour donner un second souffle à cette guerre contre le terrorisme qui a sous-tendu les « guerres justes » de ces dernières décennies. Personne n’a peur du ridicule, à commencer par les médias qui en abusent pour fabriquer de l’audience à forte rentabilité ! L’objectif est de maintenir l’opinion en état de sidération et de l’enfermer dans des logiques de persuasion, qui valent les bonnes méthodes de propagande du siècle dernier, mais en beaucoup plus subtil et virtuel avec la performance actuelle des vecteurs médiatiques. 

Dans ce contexte, les scénarios terrifiants pour 2015 ne manquent pas et la plupart sont vraisemblables. Comme d’habitude, il est probable que nous ayons d’autres réalités à assumer, les jeux d’acteurs n’étant pas figés dans le marbre. Le scénario qui nous concerne le plus est bien entendu l’hypothèse qui remonte à la surface d’une fin plus ou moins programmée de l’Euro. Tous les ingrédients sont là avec la panne de croissance et la vague de déflation qui s’installe sur la zone, les difficultés de Mario Draghi face à la banque centrale allemande pour lancer sa stratégie de rachat des dettes souveraines, l’instabilité politique grecque, voire italienne si Renzi n’arrive pas à faire passer ses réformes, et surtout le risque bancaire français qui est lié au risque pays italien. En plus de ces plaques à vent, la tentation pour Cameron de tenter une sortie par le haut du système européen est désormais très forte. Tout se joue avec en arrière plan une remontée des taux américains et du dollar sur un fond de guerre des monnaies et de l’énergie. Quant à l’Allemagne, le recentrage de ses intérêts sur son Mitteleuropa et de sa stratégie sur ses frontières orientales avec la Russie, la Turquie et l‘Eurasie ne laisse plus de place aux pas de clerc de nos petits énarques au pouvoir en quête de compromis pour essayer de gagner du temps. Ces mouvements de fond peuvent se traduire par une scission entre les 1812. Sans aller sur une fractalisation totale de l’Europe, comme certains l’imaginent ou la souhaitent, un système à deux vitesses entre germaniques et latins n’est pas inconcevable dans un premier temps. Cela ne se fera pas sans un peu de casse, c’est évident. 

Pour nous, Français, un tel scénario se traduirait instantanément par une perte de richesse globale de -20% à -30%. Et alors ! En tout état de cause, il faudra bien à un moment donné revenir à la vie réelle et arrêter de penser que nous pouvons continuer à financer notre indolence et notre nostalgie d’un passé révolu à coup d’endettement public comme nous le faisons de façon dispendieuse depuis 30 ans pour acheter la paix sociale et civile. Ce pourrait être la meilleure chose qui puisse nous arriver, puisque nous avons refusé collectivement de prendre les problèmes par le bon bout. Ce serait aussi la meilleure façon de sortir le plus vite possible de ces virtualités bureaucratiques et financières qui nous bercent avec de fausses assurances, anesthésient nos capacités de jugement, contraignent nos possibilités d’innovation et neutralisent toute prise de risque. Il est évident qu’aucun politique actuel, quel que soit le bord, ne peut porter un tel discours. Mais un -30% n’est pas la fin du monde, même si c’est la fin d’un monde. Il s’agit juste d’un peu moins de confort et d’un recalage que d’autres ont assumé avec courage et détermination, et pas seulement avec abdication. L’exemple espagnol, qui est à nos portes, est dans ce domaine assez éloquent13. De toute façon, quel que soit le scénario, ce sera à un moment donné le prix à payer pour revenir à des bases saines et nous obliger à sortir une fois pour toute de toutes ces prises d’otage sociales, fiscales, juridiques, institutionnelles que nous subissons et qui tuent lentement, mais sûrement, notre pays depuis 30 ans. 

A nouveau, arrêtons de dire aux français que la crise de l’Euro s’arrêtera à la frontière, que « l’Allemagne paiera », que nous sommes les plus vertueux et le seul modèle viable et durable de la zone européenne. Tout cela est faux ! La crise de l’Euro est devant nous, l’Allemagne n’a plus envie de payer et notre sort est désormais intimement lié au sort de l’Italie et non plus à l’inoxydable traité
de l’Elysée14. Le dernier déclassement de l’agence Fitch15, qui n’est en rien surprenant, n’est qu’une énième alerte du glissement du pays dont la résistance est quasiment nulle, notamment à cet effet de ciseau mortel que constituent la déflation et la hausse des taux d’intérêt sur les marchés. Il faut arrêter de nous dire tous les jours que « les courbes vont s’inverser » ! Toujours ce même « bourrage de crane16 » dérisoire pour tenter de gagner du temps. 

De la même manière, la communication sur les ravages de l’islamisme, la barbarie de Daesh, les menaces des terroristes qui écument la bande sahélienne sont exaspérantes. Tout est mis au même niveau, entretenant dans les modes inconscients de représentation collective l’idée que nous sommes à l’aube de la fin des temps. Même s’il est indéniable qu’il y a des vraies questions sécuritaires à traiter, tant sur notre territoire qu’à l’international, sur ces radicalisations religieuses et identitaires liées à des crises profondes au sein de l’Islam, il faut les proportionner à leur juste valeur. L’instrumentalisation de la menace a toujours été un biais de gouvernance pour donner au politique une apparence de légitimité martiale et pouvoir entretenir au niveau de la population un minimum de vigilance et d’adhésion en matière de sécurité collective (surtout lorsque l’on est membre du conseil de sécurité de l’ONU et que l’on détient l’arme nucléaire). Mais la crédibilité d’une posture repose sur une évaluation pondérée et sur une mobilisation de moyens adaptés aux enjeux. La sur-réaction ou le sous-dimensionnement se terminent toujours mal sur ces registres sécuritaires. Les affirmations péremptoires que nous avons connues sur le Mali, opération qui ne devait durer que trois mois, et sur la Syrie avec une éviction du pouvoir de Bachar el Assad qui devait se faire en trois semaines, laissent pantois sur l’arrogance politique de nos responsables... 

Pour ne prendre que la réalité du Sahel, nous avons un dispositif de l’ordre de 3 000 hommes et quelques avions pour faire de la guerre de raid sur une zone aussi grande que la Méditerranée. C’est tout à fait adapté au niveau de la menace et nos unités sur le terrain font très bien leur travail de chasse aux djhadistes qui sont, ne l’oublions pas, d’abord et avant tout des bandes bien connues de criminels, maffieux et trafiquants en tout genre. Ce qui change la nature du contexte, ce sont les appellations islamistes plus ou moins contrôlées qu’ils ont adoptées afin de faire monter les enchères, notamment médiatiques, sur la zone depuis l’effondrement de la Lybie. 3 000 soldats, c’est l’équivalent d’une demi-brigade ou de trois régiments. C’est à peu près ce que nous avons toujours eu depuis 30 ans pour gérer les pulsions de ce 35ème parallèle stratégique pour les intérêts de la France. Ce sont toujours les mêmes types d’unités, toujours aussi professionnelles et performantes qui arpentent ces régions désertiques avec les armées africaines. Il en est de même au Levant avec nos dispositifs au Liban, en Méditerranée orientale ou dans le golfe d’Oman. Ce sont les mêmes que nous retrouvons dans le dispositif de lutte anti Daesh qui vient d’être mis en place aux côtés des américains pour traiter les bandes de criminels d’Abou Bakr al-Baghdadi17, certes mieux organisées et armées, mais qui n’ont rien à voir avec des armées constituées. Bien entendu, on opposera à ce mode de raisonnement que les dérivées de l’influence de tous ces réseaux avec leurs émules dans nos banlieues ou actuellement dans les contrées du Liban, pour ne prendre que ce laboratoire18, sont considérables. Elle ne le sont pas plus que ne le fut le communisme pendant un siècle avec ses réseaux clandestins et ses millions d’adhérents qui ont tous rêvé du « grand soir19 » et milité pour la révolution au prix d’une bonne centaine de millions de morts dans le monde20... Aurions-nous oublié ce que fut réellement cette menace, avec des ogives nucléaires, sur nos libertés et nos démocraties, pour avoir peur de quelques « barbus » confus et maffieux avec leur pick-up et leurs fatwas d’un autre siècle21

Sans vouloir enlever la moindre valeur aux soldats qui sont sur le terrain ou parcelles de gloire qu’ils méritent, arrêtons de penser que ce qu’ils font est de l’ordre de l’inédit et de l’exceptionnel et de donner ainsi à nos politiques en perte d’adhésion populaire un semblant d’audience fugitive et dérisoire. Ils font ce pourquoi ils ont été formés et entraînés et le font très bien, avec des résultats éloquents, au même titre que nos services de sécurité sur le territoire national22! Ils le font même de mieux en mieux, quel que soit le pays allié, mais avec des dispositifs très pointus dotés de forces spéciales aguerries et de technologies très performantes23. Mais arrêtons de nous raconter des histoires, sur tous ces théâtres : Nous sommes loin des 940 000 hommes engagés en 1991 par les Américains en Irak24avec une coalition de 34 pays, des 50 à 60 000 hommes engagés en Ex-Yougoslavie (dont 6 000 à 7 000 français) ou des 60 000 à 100 000 hommes sur l’Afghanistan (dont 3 000 français) pendant plus de dix ans. La vraie question est de savoir si nous serions en mesure de faire face à d’autres types de menaces qui supposeraient un autre niveau d’engagement sur le plan militaire et d’adhésion de notre population25. Malheureusement, il est devenu interdit de parler de ces questions de défense avec une certaine liberté de ton, tout relevant de l’ordre du « domaine réservé », le choix des opérations comme les arbitrages sur le budget étant de l’ordre du « non discutable 26». Il est clair que l’on ne construit pas une défense sérieuse et durable avec de tels biais de gouvernance, surtout lorsque l’on sait dans quel état sont actuellement les budgets des armées et la réalité des opérations sur le terrain en termes de disponibilités des moyens, qu’ils soient humains ou techniques. Fermer le ban et respect aux soldats ! 

Certes, la propagande fait partie des outils de gouvernance mais quand cela devient une fin en soi il faut se poser des questions sur la vacuité du pouvoir. Le summum a été atteint au cours de l’été 2014 avec l’affaire ukrainienne et notre alignement inconditionnel et surréaliste sur Washington. Il n’est pas évident qu’Obama et Kerry nous aient demandé de faire autant de zèle... mais puisque nous nous sommes prêtés à ce jeu, pourquoi n’en profiteraient-ils pas pour nous sous- traiter quelques jeux tactiques de second ordre (au prix de deux BPC immobilisés à Saint-Nazaire...). Certes, Vladimir Poutine, comme Bachar el Assad, ne sont pas des enfants de chœur et la réalité de leurs contextes géostratégiques n’en font pas des démocrates, comme nous ne cessons de leur reprocher un peu naïvement, alors que nous sommes très éloignés de la realpolitik qu’ils ont à assumer sur le terrain. Mais pourquoi ne parle-t-on pas des méthodes mises en place par les occidentaux, et qui n’ont rien de démocratiques, pour essayer de maîtriser la confusion politique et la corruption qui règnent à Kiev. Pourquoi passe-t-on sous silence cette nomination étonnante le 2 décembre, d’une Américaine, d’un Géorgien et d’un Lituanien (tous naturalisés ukrainiens dans la matinée et directement liés aux lobbies américains, voire à la CIA) à des postes clés, et pas des moindres27, dans le nouveau gouvernement ukrainien ? Imaginons une telle décision chez nous ? Pourquoi ne dit-on pas sur un autre registre la vérité sur les financements réels des mouvements Daesh et Al Nosra qui égorgent musulmans et chrétiens d’Orient en Irak et en Syrie ? Là encore, nos compromis financiers avec les monarchies du Golfe, s’ils peuvent s’expliquer, ou se justifier selon les cénacles, pour assurer la couverture de nos dettes et du train de vie de l’Etat, ne sont pas des plus démocratiques... La vie internationale est cynique et impitoyable pour les faibles et les lâches. 

Où se situent le bien et le mal ? Qui est dépositaire de la vertu ? Arrêtons par ailleurs de nous faire peur avec un soi-disant retour de la « guerre froide » sous prétexte que quelques milliers de miliciens cagoulés dans le Donbass seraient sur le point de provoquer une guerre nucléaire dont personne ne veut, à commencer par les russes... Tout cela afin de permettre à l’OTAN d’imposer un nouveau cahier des charges aux lendemains de son retour d’Afghanistan et de maintenir ainsi l’alliance dans un niveau de dépenses élevées face au retour d’une « menace russe ». Cela a permis de relancer de nombreux contrats d’armements en souffrance, comme le bouclier anti missile, et d’équiper des pays frontaliers de la Russie qui sont ravis de cette manne du complexe militaro industriel américain28. On oublie de dire que cette posture tactique a permis à Poutine de relancer sa propre politique de défense et d’initier de nouveaux accords stratégiques avec la Chine, l’Inde, l’Iran et même la Turquie qui marginalisent l’Europe dans un certain nombres de nouveaux jeux émergents. Soyons sérieux, les quelques exactions de nos djhadistes sur le Sahel n’ont rien à voir avec les 500 000 morts des années noires en Algérie entre le FIS, le GIA et l’armée. Cela n’a rien à voir avec les millions de morts provoqués par la famine, la malnutrition, l’eau, les guerres tribales qui ont et continuent à meurtrir le Soudan, la corne de l’Afrique et la région des grands lacs en Afrique. L’hystérie sur l’Ebola29 et ses 4 000 victimes masque les vrais enjeux que nous avons sur d’autres fronts épidémiologiques avec le paludisme, la dingue, le Sida et ses millions de personnes concernées. Et arrêtons de penser que l’Ukraine est l’équivalent des 100 millions de morts qui ont été générés par le communisme. Soyons un peu plus décents dans nos évaluations. 

Les sujets ne manquent pas pour 2015. Vladimir Poutine, Recep Tayyip Erdogan, le maréchal Sissi, Narendra Modi, Shinzo Abe, Benyamin Netanyahou... n’ont pas fini de nous surprendre. Obama, de son côté, va également vouloir, malgré un Congrès très remonté contre lui (avec notamment John Mac Cain à la présidence de la commission des forces armées), affirmer sa stratégie de repositionnement du leadership américain sur le pacifique nord en se retirant du Moyen-Orient et du glacis eurasien laissant à l’Iran et aux puissances centrales le soin de réguler la région30 .Xi Jinping pourrait de même être au devant de la scène avec l’éclatement des bulles spéculatives qui minent l’économie chinoise et mettent en danger une grande partie de la classe moyenne. Et que dire des BRICS31 qui veulent remettre en question la domination du dollar... 

Tous les jeux sont ouverts et la realpolitik s’impose partout. Le monde n’est ni bipolaire, ni multipolaire, il devient « apolaire »32 pour reprendre cette terminologie qui fait désormais recette dans les couloirs de nos chancelleries. Face à cet état des lieux, l’imposture n’est plus de mise. Il faut arrêter de nous saturer avec de fausses peurs et de nous laver le cerveau avec des effets de manche permanents. Il est urgent de dire aux Français la vérité et toute la vérité sur le niveau réel de notre endettement, de la faillite de l’Etat, de la vulnérabilité de notre système bancaire et de nos véritables forces et faiblesses. Il est plus que temps d’arrêter ce spectacle consternant qui nous est servi quotidiennement. Finalement, comme l’écrivait si bien Fénelon, « Il n’y a pas de plus dangereuse illusion que la notion par laquelle les gens s’imaginent éviter l’illusion »...


1Lire les autres articles écrits par l’auteur sur cette question des « peurs » et de l’évaluation des risques :
http://www.xavierguilhou.com/Clients/Guilhou/site_xavier.nsf/pages/publi-articles- 42?OpenDocument&ticket=329DF6
2 « Divide ut regnes » : Diviser pour régner : stratégie visant à semer la discorde et à opposer les éléments d'un tout pour les affaiblir et à user de son pouvoir pour les influencer.
3 Définition du Chaos par les grecs: . http://www.mythologiegrecque.fr/13.html
4 Le traité de Versailles : http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Versailles#Les_trait.C3.A9s_annexes 5 Le traité de Sèvres : http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_S%C3%A8vres
6 Le traité de Lausanne : http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Lausanne_(1923)

7Les accords Sykes-Picot: http://www.monde-diplomatique.fr/2003/04/LAURENS/10102 article de Henry Laurens dans le Monde diplomatique
8 La déclaration Balfour : http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9claration_Balfour_de_1917
9 Le pacte de Quincy et l’histoire diplomatique du pétrole : http://www.geopolintel.fr/IMG/pdf/petrole_histoire.pdf

10 Les « empires centraux » : http://fr.wikipedia.org/wiki/Empires_centraux
11 Cf. « l’affaire Snowden – comment les Etats-Unis espionnent le monde » - Antoine Lefebure – La découverte 20 fev 2014

12Voir « L’UE-28 et la zone euro à 18 » Par Charlotte Bezamat-Mantes : http://www.diploweb.com/L-UE-28-et- la-zone-euro-a-18.html
13 Lire «Courage et discipline : le modèle espagnol pour surmonter la crise » de Michel Pébereaux dans Enjeux les Echos du 11 décembre 2014: http://m.lesechos.fr/enjeux/courage-et-discipline-le-modele-espagnol-pour- surmonter-la-crise-0203968198763.htm
14 http://www.france-allemagne.fr/Traite-de-l-Elysee-22-janvier-1963,0029.html
15 L'agence de notation Fitch Ratings a dégradé la note de la dette de la France vendredi 12 décembre dans la soirée. La dette française est désormais notée AA, trois crans au-dessous de la note maximale, quand elle était jusqu'à présent de AA +. L'agence de notation avait prévenu la France le 14 octobre qu'elle plaçait sa dette sous surveillance négative, en raison de son incapacité à réduire son déficit. Les analystes de Fitch comme de Moody’s et de Standard and Poors sont assez convergents n’étant pas convaincu par les mesures du gouvernement en matière de réduction des déficits et surtout par la faible croissance du pays qui passe en dessous de la moyenne de la zone euro.
16 Lire d’Albert Londres « Contre le bourrage de crâne, recueil de reportages de 1917-1918 », Arléa Paris 1998. 17http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/06/30/qui-est-al-baghdadi-nouveau-calife- djihadiste_4447612_3218.html

18 Voir à ce propos le remarquable reportage de la réalisatrice canado-libanaise Katia Jarjoura : « Le Liban de fractureenfracture» http://www.arte.tv/guide/fr/053414-000/liban-de-fracture-en-fracture
19 Le « Grand Soir » est une notion communiste et téléologique qui correspond à un bouleversement social visant principalement au renversement du capitalisme mais également à celui de la société devant être remplacée par une société nouvelle. Pour Sarthe, il s’agit du dernier grand « mythe poétique » révolutionnaire en France...

20 Cf. « Le livre noir du communisme crimes, terreur et répression », éd Robert Laffont 1997 21Cf.http://fr.radiovaticana.va/storico/2013/09/26/a_damas%2C_une_fatwa_contre_les_chr%C3%A9tiens%2C _les_druzes_et_les_alaouites/fr1-732012
22 Voir émission de radio avec l’auteur http://www.youtube.com/watch?v=ZNgLj1mQTI8

23 Cf. http://www.lefigaro.fr/international/2014/11/24/01003-20141124ARTFIG00302-des-sas-britanniques- combattraient-l-etat-islamique-en-irak.php
24 Pour la France (Opération Daguet): 19 000 hommes (terre : 12 000, air : 1 160, mer: 2 400, réserves à Djibouti : 3400), 15 navires, 60 avions, 120 hélicoptères, 40 chars d'assaut, 100 chars légers, 600 blindés, 18 pièces d'artillerie.

25 « Esprit de défense : es-tu là ? », Xavier Guilhou revue Défense nationale septembre 2011 http://www.xavierguilhou.com/clients/guilhou/site_xavier.nsf/005546776102f9f0c1256d09002800c8/ff9cf89c 59f84c0dc125718000319cfe/$FILE/EspritDefenseEstuLa.pdf 26http://www.opex360.com/2014/10/30/depute-deplore-hemicycle-vide-pour-le-debat-portant-sur-le-budget- de-la-defense
27 Natalie Jaresko, une Américaine d'origine ukrainienne qui a travaillé pour le Département d'Etat américain et pour un fonds d'investissement ukrainien financé par le Congrès américain, se retrouve ainsi ministre des Finances. Le Lituanien Aivaras Abromavicius, co-dirigeant d'un fonds d'investissement suédois, devient ministre de l'Economie, et le Géorgien Alexander Kvitachvili, ex-ministre de la Santé en Géorgie, hérite du ministère de la Santé. Bien entendu interrogée sur cette nomination, la porte-parole du département d'Etat à Washington a assuré que les Etats-Unis «n'avaient rien à faire du tout avec cela». «C'est le choix du peuple ukrainien et de leurs représentants élus», a affirmé Marie Harf.
28 La Pologne vient de signer un contrat d’achat de 40 missiles de croisière américains pour ses avions de combat F16, pour quelque 250 millions de dollars. La crise en Ukraine lui a permis d’accélérer sa politique d’armement qui va bénéficier d’un budget de 33,5 milliards d’euros au cours des prochaines années. Comme la Pologne les pays baltes voisins ont déclaré leur intention de faire remonter leurs dépenses militaires à 2% du PIB.
29 « L’OMS et ses défaillances sur la gestion de l’alerte Ebola » : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8aa71d00-822a-11e4-93e1-673e9b09404c
30La stratégie d’Obama ne va pas dans le sens des lobbies du complexe militaro industriels républicains et encore moins dans celui des monarchies du Golfe qui lui font d’ores et déjà payer le prix avec la chute des cours en-dessous des 60$ le baril afin de bloquer sa stratégie d’autonomie énergétique avec notamment les schistes bitumineux. Cette chute des cours est aussi destinée à Poutine pour casser sa stratégie de contrôle de la sécurité énergétique mondiale sur le nœud eurasien au dépend de la péninsule arabique. Ces réseaux proches des néoconservateurs mettent tout en œuvre pour neutraliser l’élection d’un nouveau démocrate à la Maison Blanche en 2016 et réaffirmer leur leadership sur ce verrou eurasien et moyen-oriental. Voir les analyses de l’auteur sur la Syrie et l’Ukraine et le rôle de ces réseaux dans ces conflits:
http://www.xavierguilhou.com/Clients/Guilhou/site_xavier.nsf/pages/publi-diploweb?OpenDocument
31 Les BRICS créent leur propre banque de développement Le Figaro 16 juillet 2014 :
http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2014/07/16/20002-20140716ARTFIG00001-les-cinq-grands-pays- emergents-defient-l-hegemonie-occidentale.php
32 Article de Laure Mandeville dans le Figaro : http://blog.lefigaro.fr/lettres-de-washington/2012/02/vers-un- monde-apolaire.html



L'histoire, qui est toujours tragique, montre que l'effondrement des civilisations n'est pas que l'affaire des politiques, elle est en premier lieu le résultat d’une lâcheté collective qui a permis à des imposteurs de gouverner et à des barbares de ramasser le pouvoir. Est-ce bien cela que nous voulons pour les générations futures ? Pourtant, c’est bien cette question qui nous est posée derrière ces attentats qui endeuillent la France ! La situation que nous devons désormais assumer est bien de l’ordre de la responsabilité globale, quels que soient les acteurs au sein de notre société, et pas uniquement de la simple responsabilité des boîtes à outils sécuritaires, judiciaires et administratives qui sont systématiquement instrumentalisées sur le plan médiatique. Même s’il faut le faire pour rassurer les populations, ne nous trompons pas ni dans le de quoi s’agit-il, ni dans l’identification des enjeux et encore moins dans la perception des conséquences pour notre pays1.
 
 Dans ce contexte, est-il vraiment judicieux de tenter de s'approprier des pouvoirs exceptionnels au niveau de l'exécutif parce qu’une dizaine de kamikazes a réussi à passer entre les mailles du filet sécuritaire avec le bilan que nous connaissons (et qui aurait pu être beaucoup plus sordide si les cibles programmées du stade de France avaient été atteintes) ? L'état d'urgence qui a été mis en œuvre pour permettre au monde sécuritaire de faire enfin son travail n’a finalement rien d’exceptionnel. C’est une décision qui s’impose d’elle- même pour palier à des années de laxisme et de non décision ! Avec l’adoption des lois sur le terrorisme et sur le renseignement n’avons-nous pas des bases suffisantes pour démanteler, neutraliser et éradiquer ces formes de radicalisme islamique qui instrumentalisent la haine et prônent la destruction de nos référentiels et de nos logiques de vie ? Faut-il vraiment aller plus loin sur la limitation des libertés individuelles ? 

Faut-il par ailleurs se contenter d’un discours budgétaire pour montrer que nous répondons à une menace globale par l'amélioration de la boîte à outils en jouant sur la seule augmentation des capacités ? Est-ce que ces décisions « cosmétiques » vont permettre une meilleure efficacité sur le terrain et contribuer réellement à mettre de l’intelligence dans la résolution des problèmes que nous avons à résoudre ? « Le pacte de sécurité contre le pacte de stabilité » est à cet égard un très bel effet de manche politico médiatique... C'est beau mais ce n'est pas la question que nous avons à traiter. 

Désormais, il faut que notre pays non seulement se ressaisisse mais encore s'organise à tous les niveaux pour faire face. Cela suppose dans un premier temps que le système judiciaire puisse véritablement fonctionner avec la fermeté, l’indépendance et l'autorité attendues dans une démocratie menacée d'intentions apocalyptiques (cf. "Le flot de tempête" annoncé dans la dernière revendication de Daesh). Or, tout le monde s’accorde sur l'échec de la politique judiciaire qui est menée depuis des années laissant à ces réseaux des capacités de gesticulation et de contamination inacceptables et dangereuses. Tant que le système judiciaire ne fonctionnera pas, et quel que soit notre environnement législatif, la lutte anti terroriste ne pourra pas fonctionner de façon optimale. 

Dans un second temps, il faut permettre au sécuritaire d'assumer ses missions de prévention, d'intervention, voire de neutralisation, et si besoin de destruction sans attendre une nouvelle catastrophe collective. Pour cela, il faut juste appliquer la loi, que la loi, rien que la loi mais avec des ordres clairs ! Ce qui ne fut pas le cas ces dernières années ! Nous en avons l'illustration depuis la tragédie de la nuit du 13 novembre, en l'espace de quelques jours ce sont des centaines de filières sensibles qui sont démantelées avec la saisie de stocks d’armes considérables et l’interpellation de djihadistes très dangereux. Pourquoi a-t-il fallu attendre 130 morts et 350 blessés pour prendre ces décisions de perquisitions et d’anticipation sur des risques identifiés et avérés ? Cela signifie aussi que nous avions des renseignements mais qu’ils ne pouvaient pas être exploités correctement... 

Par ailleurs, il faut monter sans attendre un dispositif complémentaire de sécurité intérieure mobilisable immédiatement dans le continuum de nos opérations extérieures, avec une véritable réserve militaire2 (garde nationale pour certains) qui soit en mesure de fournir des capacités d’intervention adaptées à ces nouvelles formes de risques terroristes. Seul un dispositif fortement militarisé et semi professionnalisé, de surcroit assis sur du volontariat,
permettra de traiter au plus près de la population cette exportation des formes de guerre que nous connaissons en Afghanistan, au Moyen orient ou au Sahel avec les EID, les voitures piégées, les kamikazes etc. Il faut arrêter de penser que ces menaces sont de l’ordre des séries virtuelles type « homeland » où tout se règle en 45 minutes sur un écran plat. Là, la moindre faiblesse se traduit par des vies abîmées ou déchiquetées. 

Enfin, il faut permettre à notre société d’être plus lucide à tous les niveaux et arrêter de se complaire dans une fausse neutralité multiculturelle. Ces réseaux, qui ne représentent rien en valeur absolue mais qui sont absolument déterminés pour nous détruire par tous les moyens, ne nous respectent pas. Ils nous méprisent et nous haïssent. Il n’y a rien à négocier avec eux. Est-ce que nous avons bien compris que ces réseaux vont tout utiliser pour nous égarer (cf. la Taqiya) et nous diviser (cf. la Fitna) ? 

Il nous faut en être conscients et être plus robustes au sein de nos organisations et plus résilients tant au niveau individuel que collectif3. Ce n’est pas une question de guerre, juste une absolue nécessité de survie. Pour cela, il faut admettre notre mortalité, la fragilité de notre humanité et les limites de notre universalité. Il faudra aller bien au-delà puisqu’ils nous interpellent sur nos convictions et nos valeurs profondes. Certes, chanter timidement la Marseillaise et allumer des cierges nous rassure, mais quels sont nos véritables antidotes pour éradiquer ces formes de barbarie dans une société déchristianisée et matérialiste qui ne croit plus en rien ? Avons-nous envie de nous soumettre à ces forces ténébreuses et apocalyptiques ? 

Notre pays est blessé profondément dans sa chair. Pour certains il y a une effroyable souffrance, pour d’autres il y a la tentation du renoncement, pour beaucoup il y a de la colère (pas forcément de la haine), mais cette fois-ci, à la différence du mois de janvier, les Français exigent une réponse claire et nette de la part des responsables du pays. La France a besoin de se redresser, elle veut résister, elle souhaite vivre ! Qu’attendons-nous pour réagir4? D’avoir notre jeunesse engagée malgré elle dans une guerre que Daesh veut nous imposer alors que nous avons encore les moyens et les capacités d’enrayer ce processus ? La guerre est la marque impitoyable d’un échec stratégique, elle signifie que nous n’avons pas su mettre de l’intelligence et de la fermeté quand et là où il le fallait. Mais pour cela, il faut un certain courage historique. Voilà ce que les Français réclament désormais en mémoire de leurs enfants tombés innocemment en ce funeste vendredi 13 novembre : du courage ! 

Xavier Guilhou
Novembre 2015 

1 Cf. qualification des attentats du 13 novembre. https://www.apm.fr/rencontres/actualite/2633/afficher.htm
2 Cf. « Surtout ne supprimez pas la réserve » Xavier Guilhou - Revue Défense Nationale n 340 mars 2013 http://www.xavierguilhou.com/Clients/Guilhou/site_xavier.nsf/005546776102f9f0c1256d09002800c8/ff9cf89c 59f84c0dc125718000319cfe/$FILE/Surtout,%20ne%20supprimez%20pas%20la%20R%C3%A9serve.pdf
Cf. « La réserve: faut-il la supprimer ou la réinventer? » Xavier Guilhou - Revue Agir n°13 Février 2003 http://www.xavierguilhou.com/Clients/Guilhou/site_xavier.nsf/005546776102f9f0c1256d09002800c8/ff9cf89c 59f84c0dc125718000319cfe/$FILE/la%20r%C3%A9serve%20%C3%A0%20supprimer%20ou%20%C3%A0%20r% C3%A9inventer.pdf
3 cf. « Admettre, résister et revivre » tribune du 20 novembre de Xavier Guilhou sur Jobsferic http://www.jobsferic.fr/Admettre-resister-et-revivre-.html
4 cf. « Quand la France réagira... » Xavier Guilhou - Eyrolles 2007



octobre 04, 2015

Numérique - Renseignement -Loi : Étatisme Vs Liberté, des propositions...

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.


« Il n'est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage.  » - Périclès

Alors que la France se définit fièrement comme la patrie des Droits de l’Homme, nos droits individuels sont insidieusement bafoués. Nous vivons hélas dans un Etat qui possède deux visages, sort de fusion du "nanny state" et de "big brother". D’un coté l’Etat nounou, faussement rassurant, se charge de notre bien-être. De l'autre, une ferme prise en main de nos comportements cherche à en éradiquer les comportements jugés à risque. Les lois restreignant la liberté d’expression se multiplient. La culture du flicage et de la répression se généralise « pour notre bien à tous », dans un prétendu « intérêt général ».
Grâce à ses efforts et à l'utilisation de sa raison, l'homme peut progresser indéfiniment vers la recherche du bonheur lorsqu’il est libre de ses actions et qu'il en assume les conséquences. S'il jouit de la liberté, l'homme peut créer, inventer de nouvelles voies, s’associer avec autrui. S'il en assume les conséquences, il peut tirer parti de ses erreurs pour progresser. Nous aimons la liberté et avons pour objectif essentiel le passage d’une « société de contrôle » à une véritable « société de responsabilité ».
Nous combattons la plupart des atteintes à nos libertés, car l’arbitraire permet souvent d’étendre des mesures utiles au-delà du nécessaire et de servir certains intérêts moins nobles que leur objet initial.

Parti Libéral Démocrate France

Sommaire:

a) GEOPOLITIQUE DE L’INFORMATION : La surveillance des communications électroniques internationales de retour à l'Assemblée - silicon - Ariane Beky
 
b) Souveraineté numérique et prospérité économique dans un monde transformé - Rapporteur : Jacques MARCEAU, membre du conseil scientifique de l'Institut de la Souveraineté Numérique - Fondation Concorde - M. Rousseau

c) France: la presse judiciaire attaque la nouvelle loi sur le renseignement + Rappel faits 2015 - sputniknews.com

d) Données personnelles: l'Europe pourrait durcir le ton - Valérie Smakhtina - sputniknews.com

e) Divers liens sur ce thème de l'Université Liberté - Alain Genestine



a) GEOPOLITIQUE DE L’INFORMATION : La surveillance des communications électroniques internationales de retour à l'Assemblée


Pour combler le volet censuré de la loi sur le renseignement, la proposition de loi sur la surveillance des communications électroniques internationales est examinée à l’Assemblée nationale. Après la censure partielle de la très contestée loi sur le renseignement, qui a été validée dans sa quasi-totalité par le Conseil Constitutionnel le 23 juillet dernier, la surveillance des communications internationales refait surface sous la forme d’une proposition de loi. En laissant au parlement le soin de présenter un texte rustine, le gouvernement agit à distance (ni projet de loi, ni étude d’impact) pour autoriser et encadrer la surveillance massive. Ce jeudi 1er octobre 2015 à l’Assemblée nationale, l’examen en séance publique du texte a débuté. 

Compléter la loi sur le renseignement
La procédure est accélérée... Le texte relatif aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales est présenté par les députés SRC Patricia Adam et Philippe Nauche de la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée. Ce texte prévoit la création d’un « cadre spécifique » à la surveillance des communications internationales (soit l’émission ou la réception d’une communication depuis l’étranger). Pour ses promoteurs, les services de renseignement français doivent pouvoir assurer, dans un cadre légal, cette surveillance « aux fins de défense et de promotion des intérêts fondamentaux de la Nation ». Les « correspondances » (contenus) et les « données de connexion » (métadonnées) sont incluses dans la proposition. Par ailleurs, à la différence des interceptions de sécurité, les autorisations de surveillance délivrées par le Premier ministre « ou l’un de ses délégués », ne seront pas soumises à l’avis préalable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). De plus, l’article 1er du texte, qui modifie le chapitre IV du titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure, « autorise l’exploitation non-individualisée des données de connexion interceptées ». La Commission de la défense a repoussé, mercredi 30 septembre, tous les amendements proposés par les députés Les Républicains Laure de La Raudière et Lionel Tardy et par l’écologiste Sergio Coronado (avec d’autres parlementaires). Seuls les amendements de forme ont été conservés. 

Prévoir des exceptions... limitées
Amnesty International condamne un texte aux « motifs vastes et peu précis » qui « légalise la surveillance de masse », sans voie de recours. La surveillance à grande échelle, déjà présente dans la loi renseignement du 24 juillet 2015, ne viserait plus seulement l’antiterrorisme mais pourrait « être justifiée pour l’ensemble des finalités mentionnées à l’article 811-3 de la Code de la sécurité intérieure, y compris la défense et la promotion des intérêts majeurs de politique étrangère, économique et scientifique». Une organisation, une entreprise ou un particulier qui communiquerait en France avec l’étranger ou recevrait une communication émise depuis l’international, pourrait donc tomber sous le coup de cette loi. Seuls les parlementaires, les magistrats, les avocats ou les journalistes qui exercent en France, pourraient théoriquement bénéficier d’une forme de protection... Dans une tribune, des organisations citoyennes font le même constat. Elles jugent, par ailleurs, que « la période prévue pour la conservation des données est clairement injustifiée, excessive (un an pour le contenu, six ans pour les métadonnées et huit ans pour les communications chiffrées) et en contradiction avec les principes posés par la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt du 8 avril 2014. » Un point de vue partagé par l’association de défense des droits et libertés La Quadrature du Net. L’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN), dont elle fait partie, appelle les élus à rejeter la proposition de loi et le gouvernement à ouvrir un débat public sur la surveillance internationale.

Ariane Beky




b) Souveraineté numérique et prospérité économique dans un monde transformé 

Introduction
400 ans, c’est le temps requis par le livre pour atteindre le nombre clé de 50 millions d’utilisateurs. La radio, elle, a mis 38 ans, la télévision, 13, l’Internet, 5, Facebook, seulement 2 années. En matière technologique, rien n’est plus constant que le changement. Impossible, aujourd’hui, d’appréhender l’évolution du progrès technique sur une base cyclique. Impossible, aujourd’hui, de prédire ce que sera le produit de cette nouvelle dynamique.
Des téléviseurs Samsung connectés qui enregistreront, une fois allumés, l'ensemble de vos conversations avant de les envoyer à une tierce entreprise1 ; un iCloud empli de failles permettant à des hackers mal intentionnés de diffuser des clichés privés, sont autant de petits exemples concrets, prémisses de grands bouleversements par la remise en cause des valeurs de propriétés et de libertés individuelles.
Face à cette e-révolution, les acteurs du paysage politique sont désemparés et n’arrivent plus, ni à en identifier les véritables enjeux, ni à proposer les mesures qui feront que notre pays pourra continuer de prétendre à l’indépendance et à la prospérité dans un monde où toutes les cartes sont rebattues.
La notion de souveraineté2 est chaque jour davantage soumise au développement croissant de nouveaux impérialismes tels que ceux des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et plus récemment des NATU (Netflix, Airbnb, Tesla, et Uber) qui surfent sur le retard des règles et des normes en vigueur dans les différents pays du monde, peu adaptées à la mondialisation ultra rapide des activités économiques générées par le développement exponentiel de l’Internet.
De surcroît, les modèles économiques innovants de ces grandes plateformes se nourrissent de l’ensemble des données publiques et personnelles de leurs usagers pour offrir toujours plus de services « gratuits » ou à des prix quasiment impossibles à concurrencer pour des acteurs économiques « traditionnels ». Des modèles qui leur permettent enfin de s’exonérer de presque toute contribution fiscale dans les pays dans lesquels ils opèrent.
Ces géants, tous américains, bénéficient depuis toujours du soutien des Etats-Unis, soutien réaffirmé dernièrement par le président Barack Obama : « Nous possédons l’Internet. Nous l’avons créé, développé et perfectionné à un niveau qui fait qu’ils [les pays Européens] ne peuvent pas nous concurrencer »3. Un soutien qui confine parfois à la complicité comme Edward Snowden a pu en faire la démonstration dans plusieurs de ses révélations.
Selon Bernard Benhamou4, secrétaire général de l’Institut de la Souveraineté Numérique, depuis l’affaire Snowden, il est, désormais, inscrit dans la conscience partagée que :
  • -  la volonté des acteurs technologiques de protéger les données de leurs usagers n’est plus un invariant économique,
  • -  la surveillance ne concerne plus uniquement des enquêtes et des individus isolés mais l’ensemble des citoyens d’un Etat,
    -  les métadonnées5 issues de la navigation des internautes sont aussi sensibles que le contenu des échanges eux-mêmes,
  • -  toutes les entreprises ne disposent pas des moyens nécessaires pour protéger leurs données sensibles des intrusions issues des Etats ou d’autres acteurs économiques...
  • -  Un Etat, par l’intrusion de ses services secrets dans l’Internet et la création de backdoors, peut prendre le risque de fragiliser à lui seul l’ensemble de l’Internet.
    Ces révélations d’Edward Snowden semblent avoir déjà engendré d’importants changements comportementaux. Déjà en 2013, et selon une étude du Pew Research Center6 en date de 2013, 86% des internautes « ont déjà tenté de détruire ou de dissimuler leurs informations numériques » et 55% « ont cherché à éviter d’être observés en ligne par leur employeur ou par les instances gouvernementales ». En 2015, les résultats du baromètre ACSEL-CDC de la Confiance des Français dans le numérique7 confirment cette fâcheuse et préoccupante tendance pour un pays, comme la France, qui fonde nombreux de ses espoirs de redressement sur le numérique.
    Aussi, s’il est un domaine où le pouvoir politique doit d’urgence reprendre la main, c’est bien celui du numérique. Non pas dans un réflexe protectionniste vis-à-vis de puissances économiques qui ont pris des positions décisives avant nous, mais dans le but de préserver notre capacité de choisir dans quel monde nous voulons vivre demain et de livrer bataille dans les secteurs où les positions ne sont pas encore établies.
    C’est dans ce contexte que la Fondation Concorde a décidé de constituer un groupe de travail constitué d’experts, d’entrepreneurs, d’universitaires et d’élus dans le but de proposer des mesures concrètes pour que le numérique reste une chance et un moteur au service de la prospérité économique en France et en Europe. 

1 Tel que mentionné dans les conditions générales de ventes des smarts tv de Samsung.
2 Définition du Larousse : Pouvoir suprême reconnu à l'État, qui implique l'exclusivité de sa compétence sur le territoire national

(souveraineté interne) et son indépendance absolue dans l'ordre international où il n'est limité que par ses propres engagements (souveraineté externe)
3 Barroux, D., Les Echos du 16/02/2015, citant une interview du président Barack Obama au site recode.net.

4 Benhamou, B., Les perspectives de la gouvernance mondiale de l’internet après Snowden

5 Définition du Larousse: Donnée servant à caractériser une autre donnée, physique ou numérique : Les métadonnées sont à la base de l’archivage.
6 Pew Research Center, 2013, Anonymity, Privacy and Security Online http://www.pewinternet.org/2013/09/05/anonymity- privacy-and-security-online/

7 http://www.acsel.asso.fr/resultats-du-barometre-2015-acsel-cdc-de-la-confiance-des-francais-dans-le-numerique/ 


Synthèse
Impossible, aujourd’hui, d’appréhender l’évolution du progrès technique sur une base cyclique. Impossible également de faire face à tous les risques induits par ce monde ultra-rapide du sur nos vies privées. Face à cette e-révolution, les acteurs du paysage politique sont désemparés et n’arrivent plus, ni à en identifier les véritables enjeux, ni à proposer les mesures qui feront que notre pays pourra continuer de prétendre à l’indépendance et à la prospérité dans un monde où toutes les cartes sont rebattues.
La notion de souveraineté est chaque jour davantage soumise au développement croissant de nouveaux impérialismes qui surfent sur le retard des règles et des normes en vigueur dans les différents pays du monde, encore peu adaptées à la mondialisation ultra rapide des activités économiques générées par le développement exponentiel de l’Internet. Face à cette croissance extraordinaire du numérique, les pouvoirs publics doivent prendre des mesures afin de protéger les vies privées et données personnelles des citoyens, mais également assurer la prospérité économique du pays. 

COMMENT REPRENDRE EN MAIN NOTRE DESTIN NUMERIQUE ?
- Penser la souveraineté numérique à l’échelle européenne
Bien que la France dispose de nombreux atouts dans le domaine du numérique (infrastructures, formations...), elle doit désormais s’associer à ses voisins européens afin de porter collectivement leurs exigences sur la souveraineté numérique, le respect de la vie privée, la protection des données personnelles etc. 

Propositions
  • -  Faire de la France un territoire d’excellence en matière de stockage, de traitement et de régulation des données grâce à l’Europe en instaurant une Constitution européenne du numérique et en développant le duo franco-allemand sur le sujet.
  • -  Rassembler les mécanismes de contrôle du Safe Harbor
  • -  Promouvoir un label «Hosted in Europe» qui certifierait le respect de critères de sécurité et de souveraineté définis par un cahier des charges européen.
- Maitriser les questions de souveraineté numérique : un devoir pour les politiques
D’abord l’Etat pourrait voir dans le numérique une occasion de restaurer le dialogue avec ses citoyens mais surtout, il doit se faire garant de la protection de nos données personnelles et collectives. 

Proposition
- S’appuyer sur des institutions politiques compétentes dans les domaines technologiques en créant une fonction de responsable des choix technologiques de l’Etat et mettant en place une formation aux questions du numérique pour les acteurs de la vie publique (élus, syndicats et médias).
- Résister à la tentation protectionniste ne veut pas dire laisser faire !
La notion de souveraineté numérique ne peut être approchée que sous un angle offensif permettant à la France la maîtrise de son destin numérique et la conquête de nouveaux marchés. Bien que le milieu semble pris d’assaut par les géants américains, notre savoir-faire européen peut encore s’imposer. Pour cela cependant, il faudra savoir se donner les moyens, politiques et économiques d’un puissant soutien à cette ambition (au-delà de l’investissement en R&D).
- S’assurer la souveraineté des compétences grâce à un système favorable aux startups
Certes la France peut continuer à gagner en attractivité en finançant la recherche, l’innovation et le progrès technique mais elle peut aussi devenir une référence en matière de droit et de régulation numérique. 

Proposition
  • -  Mettre en place par un système favorable au développement des start-ups par une réforme de la commande publique, par la simplification et la sécurisation des dispositifs de soutien à l’innovation (clarifier le CIR), par l’institution d’un « Small Business Act » pour les TPE et PME du numérique.
  • -  Développer et promouvoir un modèle assurant un cadre juridique permettant l’exploitation des données tout en créant les conditions de la confiance liées à la protection de la vie privée et au secret des affaires.
- Donner de l’espace aux ambitions entrepreneuriales
La France et l’Europe doivent donc offrir un « terrain de jeu plus varié et stimulant » aux jeunes entrepreneurs (à l’image des Etats-Unis). Le marché européen grâce à sa taille, son dynamisme et le fort pouvoir d’achat de sa population, offre d’importantes perspectives pour la conquête de marchés mondiaux.
En outre, dans le domaine du numérique, les startups jouent un rôle fondamental, car ce sont elles qui génèrent l’innovation de rupture, celle qui se répand et peut s’imposer mondialement. Il faut encourager leur développement, par notamment, une refondation politique

Proposition
- Créer un cadre fiscal et financier favorable et développer le capital-risque en France et en Europe avec la suppression de l’ISF et mise en place d’un taux de prélèvement unique sur le capital unique.
- Garantir le respect d’une concurrence loyale et légale
La création d’une alternative viable aux solutions réseaux et au matériel étranger permettrait la mise en place d’accords de réciprocité avec nos partenaires commerciaux sur ce secteur, nous permettant de les concurrencer sur leurs propres marchés.
Proposition
- Ouvrir le débat public sur la frontière entre droit à l’oubli et devoir de mémoire en définissant un cadre juridique garantissant, à la fois, le droit fondamental des citoyens à protéger leur vie privée et le devoir constitutif d’histoire permettant à nos sociétés de tirer les leçons de leur passé
- Se doter d’infrastructures numériques souveraines
La souveraineté numérique, c’est la souveraineté de la donnée, de sa création à son stockage. Or le parcours de la souveraineté est truffé de failles. Il est important de continuer à développer une approche globale de couverture et de souveraineté nationales incluant la mise en place de réseaux RIP lorsque c’est financièrement nécessaire.
Par ailleurs, la « production numérique » repose sur différentes couches technologiques (les composants, les systèmes d’exploitation, les logiciels innovants) dont il faut absolument que la France s’assure la maitrise parfaite de chacune. 

Proposition
- Garantir l’indépendance des organismes chargés des normes et standards

DÉTAILS:
Les neuf conditions d’une reprise en main de notre destin numérique
1) Penser la souveraineté numérique à l’échelle européenne
La France dispose de nombreux atouts dans le numérique: infrastructures de qualité, formations reconnues dans le monde entier, une génération d’entrepreneurs du numérique talentueux, etc... Cependant, sa taille ne lui permet plus, à elle seule, de faire face, comme les autres pays européens, à une concurrence faussée par des géants de l’Internet qui s’exonèrent des « règles du jeu », notamment en matière de fiscalité. Dans ce nouveau contexte, l’Europe apparaît clairement comme le bon niveau pour porter, collectivement et avec les autres pays de l’Union, ses exigences en matière de souveraineté, de respect de la vie privée et de protection des données personnelles et faire entendre sa voix dans l’actuel débat sur la future gouvernance de l’Internet. Il est certain que sa crédibilité sera d’autant plus forte qu’elle aura, en interne, repris son avenir numérique en mains pour conquérir un poids réel dans le cyberespace. De plus, si la souveraineté numérique apparait aujourd’hui comme un enjeu économique décisif, elle représente une véritable chance de fédération des pays européens autour des enjeux politiques et économiques de la révolution numérique. Ainsi et face à la montée de l’euroscepticisme, le numérique peut aussi devenir un axe de reconstruction européenne. 

2) Maîtriser les questions de souveraineté numérique : un devoir pour le politique
Le rythme fulgurant des évolutions économiques impulsées par le numérique met en lumière l’inadéquation des réponses politiques conventionnelles et des outils juridiques existants. Il est devenu urgent que les enjeux de la souveraineté numérique entrent dans le débat public et intéressent (enfin !) les politiques. Ces derniers devraient en effet y voir une occasion historique de restaurer un dialogue avec les citoyens et de porter une vision de l’avenir de notre société. Quant à l’Etat, il se doit dorénavant d’agir comme le garant de la protection de nos souverainetés individuelles et collectives, notamment face aux nouvelles intermédiations opérées par des plateformes hégémoniques. Car, et de toute évidence, la réponse à ces questions ne viendra pas de l’autorégulation prônée par ceux qui ont intérêt à dicter les termes de ce nouveau cadre. 

3) Résister à la tentation protectionniste ne veut pas dire laisser tout faire!
Parce que l’essence même de l’Internet réside dans sa dimension « cosmopolitanisante », l’expression « souveraineté numérique » ne saurait être une représentation rhétorique néo protectionniste prônant le rétablissement de frontières devenues impertinentes. Parce qu’une attitude défensive constituerait une porte ouverte sur le syndrome de « citadelle assiégée », cette notion de souveraineté ne peut être approchée que sous un angle offensif permettant à la France la maîtrise de son destin numérique et la conquête de nouveaux marchés. Nous possédons des technologies, savons favoriser la création d’entreprises innovantes et l’émergence de talents que le monde entier courtise. D’ailleurs trop souvent avec succès.
Malgré l’évidente avance des géants américains, les jeux planétaires du numérique ne sont pas faits. N’oublions pas que dans l’espace temps numérique tout va très vite et que notre savoir-faire européen, tout comme nos valeurs, peuvent encore gagner. Encore faut-il y croire et se donner les moyens,
notamment politiques, d’un puissant soutien à cette ambition. Un soutien qui doit dépasser les généreux dispositifs en vigueur dans notre pays en faveur de la recherche et de l’innovation. En effet, la France ne dispose pas, encore, de promotion spécifique de ses propres solutions technologiques. L’achat public pourrait jouer ce rôle, mais malheureusement, le code des marchés publics, mais encore plus la pratique des acheteurs de l’Etat ou des collectivités, favorisent les solutions de géants américains, souvent mieux armés commercialement pour répondre aux exigences des cahiers des charges des administrations françaises. C’est ainsi que Google peut dorénavant accéder aux correspondances d’un grand nombre de nos enseignants chercheurs de réputation mondiale, nombre de nos universités ayant choisi Gmail pour leur messagerie au détriment de la solution souveraine Renater.
D’autre pays ont cependant compris les conséquences de l’achat public. A titre d’exemple, la Chine se réserve le droit d’empêcher les achats de produits Apple pour ses administrations publiques ou, plus proche de nous, l’Allemagne interdit à tous ses acteurs publics de traiter avec des entreprises partenaires de la NSA et, à l’inverse, la Russie oblige toutes les entreprises à héberger les données sur son territoire.
Il ne s’agit pas ici, et encore une fois, d’ériger des barrières protectionnistes, mais de comprendre les enjeux de souveraineté et prendre nos responsabilités. 

4) Faire de la France un territoire d’excellence pour les données
La France peut certes renforcer son attractivité en valorisant encore davantage la recherche, l’innovation et le progrès technique, mais aussi en s’imposant comme un territoire d’excellence en matière de droit et de régulation.
A l’instar de ce qui se fait pour les études cliniques dans la santé – la France qui a mis en place un cadre scientifique et éthique exemplaire garantissant des études rigoureuses et fiables, est devenu un pays de référence dans ce domaine notre pays pourrait développer et promouvoir un modèle assurant, aux particuliers comme aux entreprises, un cadre juridique permettant l’exploitation des données tout en créant les conditions de la confiance liées à la protection de la vie privée et au secret des affaires. La France pourrait ainsi devenir un « eldorado » numérique mais aussi et surtout un modèle international engageant une véritable redéfinition de l’activité en ligne aujourd’hui soumise, en majeure partie, au bon vouloir d’une législation américaine particulièrement conciliante avec la vente industrielle de ces parcelles personnelles. Ainsi, tout comme le « made in France » est mondialement reconnu comme une marque de qualité, le « hosted in France » pourrait être aux yeux des internautes du monde entier, une garantie de sécurité et de respect de la vie privée. 

5) Donner de l’espace aux ambitions entrepreneuriales
En France, nous disposons de compétences de haut niveau (ingénieurs, développeurs, architectes, ...) capables de créer les algorithmes et les applications constituant de réelles innovations de rupture. En revanche, et en dehors de quelques notables exceptions comme Criteo, Withings ou plus récemment Blablacar, les petites équipes à l’origine de ces innovations ne trouvent pas dans notre pays, un terreau favorable à leur croissance et à une prise de position décisive sur des marchés mondiaux.
Le choix des Etats-Unis pour l’émigration de nos champions en herbe n’est ainsi pas exclusivement lié aux difficultés rencontrées par les entrepreneurs français dont il sera trop long de faire ici la litanie mais aussi par l’attractivité d’un marché intérieur américain homogène et gigantesque et des partenariats potentiels à la hauteur de leurs ambitions. Pour reprendre les propos d’un dirigeant d’une start-up française en partance pour la Silicon Valley : « On y va, parce que c’est là-bas que ça se passe ! ».
La rétention de ces talents sur nos territoires nécessite donc de leur offrir un « terrain de jeu » à la fois plus varié et stimulant. Le marché européen, grâce à sa taille, son dynamisme et le fort pouvoir d’achat de sa population, offre d’importantes perspectives pour la conquête de marchés mondiaux. Encore faut-il que cet avantage décisif ne soit pas entravé par notre culture séculaire de conservation des acquis, de protection du salarié, de séparation entre managers et managés, de recherche de stabilité et de faible mobilité géographique et fonctionnelle, qui n’ont plus rien à voir avec la réalité du travail dans le numérique, l’un des seuls secteurs de l’économie à être dans une logique de marché du travail inversé : ici, c’est l’entreprise qui cherche !
Dans le domaine de l'économie numérique, l’État doit désormais être plus jardinier qu’architecte : il doit assurer un écosystème favorable à la genèse et au développement indépendant de petites entreprises qui, une fois implantées sur le marché, pourront devenir des géantes. 

6) Maîtriser les technologies clés et la régulation associée
La «production numérique» repose sur différentes couches technologiques. Pour être en capacité d’exercer leur souveraineté numérique, la France et l’Europe doivent s’assurer la parfaite maîtrise de chacune d’entre-elles.
Premièrement, en considérant comme stratégiques les entreprises qui assurent le développement et la production de composants électroniques, première couche technologique, comme par exemple la société britannique ARM, les sociétés françaises STMicroelectronics, Sequans, Kalray, ou encore Splitted Desktop Systems constructeur français d’ordinateurs « Open Compute ».
En ce qui concerne le système d’exploitation, la 2ème couche technologique, la question ne se pose désormais plus. L’Open source est en effet la meilleure garantie de souveraineté et de stabilité de l’infrastructure logicielle, notamment parce que les systèmes développés en Open source sont plus faciles à auditer. Un atout de souveraineté considérable quand nos organisations sont contraintes, faute de choix, d’utiliser des routeurs chinois ou des serveurs américains.
En s’impliquant davantage dans ce mouvement et, en particulier, en devenant partie prenante de la définition des règles de certification des outils de stockage et de « compute », (elle en a parfaitement les moyens !), la France non seulement renforcerait sa souveraineté numérique mais encore stimulerait le développement d’un écosystème industriel qui ne demande qu’à s’y épanouir et pour mieux s’exporter.
À l’heure où la France et l’Europe, s’interrogent sur les risques qu’encourent leurs organisations à utiliser des routeurs étrangers et sur le respect de la confidentialité des données hébergées dans le cloud, être partie prenante des règles de certification des outils de stockage et de traitement des données, devient, dès lors, un sérieux atout.
Quant à la 3ème couche, le développement de logiciels permettant l’accès à des services innovants et aux applications, c’est là que tout se joue, au sein de start-ups nombreuses et prolifiques dont il faut soutenir le développement et encourager le maintien sur nos territoires.
Pour être opérantes et au service de la souveraineté de nos Etats, ces trois couches technologiques doivent être servies par une régulation, intégrant notamment la sécurisation des données et la protection des droits, principal domaine d’intervention étatique en matière de numérique. 

7) Encourager la création et la croissance de start-ups
Dans le domaine du numérique, les start-ups jouent un rôle fondamental, car ce sont elles qui génèrent l’innovation de rupture, celle qui se répand et peut s’imposer mondialement. A ce jour, une seule entreprise française du CAC 40 a moins de 30 ans. A l’inverse, la quasi-totalité des géants numériques américains sont de jeunes entreprises.
L’un des piliers de la réussite de la Silicon Valley repose sur la qualité du financement des start-ups. 50% des investissements ne rapportent rien ; 30 à 40% ont un retour sur investissement proche de zéro et 10 à 20% seulement contribuent à la rentabilité globale des fonds d’investissement ce qui constitue une distribution du risque aujourd’hui inconnue en Europe mais qui permet et encourage le succès des meilleurs projets.
Or, si le coût de création d’une start-up a été divisé par plus de 1 000 entre 1995 et 2010, le soutien au développement de ces entreprises reste très insuffisant. En dépit des discours et autres (bonnes) volontés politiques, les start-ups sont en effet trop souvent négligées par les institutions publiques et boudées par les grandes entreprises qui voient souvent en elles, et parfois à juste titre, une menace pour leurs modèles d’affaires.
Le départ des investisseurs de France réduit la capacité de financement de nos entreprises : d'après la fédération France Angels, les 400 000 aux Etats-Unis qui ont investi en 2012 23 milliards de dollars dans 62 000 projets et créé 300 000 nouveaux emplois sont à comparer aux 4 442 business angels en France (donc 10 fois moins qu’au Royaume-Uni et 100 fois moins qu’aux Etats-Unis), qui ont investi 36,5 millions d’euros en 2013 créant 3 000 emplois... Cela a pour conséquence une incapacité de la France à transformer ses découvertes scientifiques en entreprises innovantes. 50% de nos jeunes entreprises technologiques innovantes (JETI), les plus prometteuses, sont ainsi rachetées par des capitaux étrangers qui délocalisent leur développement.
A ce constat, s’ajoute une problématique juridique. En effet, le premier client d’une start-up constitue souvent 100% du chiffre d’affaires de cette dernière. Par conséquent, les grandes entreprises préfèrent minimiser leur risque en préférant des fournisseurs disposant déjà de plusieurs clients. C’est ici le principe d’abus de dépendance économique qu’il convient de remettre en cause.
Enfin, et compte tenu de la prévalence du chômage dans notre pays, la création d’emplois est souvent un préalable pour l’accès aux dispositifs de soutien publics. C’est oublier un peu vite que la création de valeur peut prendre des chemins détournés. A titre d’exemple, l’exploitation d’un data center ne générera qu’un nombre très limité d’emplois directs mais favorisera la création d’un écosystème local, lui-même générateur d’emplois.
La souveraineté numérique de la France passe par une refondation politique qui devra notamment déboucher sur un cadre plus favorable aux sociétés à forte croissance, exportatrices (ou qui ont le potentiel de le devenir), et créant des emplois qualifiés. L’Etat doit assurer un écosystème fiscal et juridique favorable à la genèse et au développement indépendant de petites entreprises qui, une fois implantées sur le marché, pourront devenir des géantes et ainsi parer à la conjoncture actuelle qui pousse 70% des jeunes formés en matière de numérique à imaginer construire leur carrière à l’étranger. 

8) Garantir le respect d’une concurrence loyale et légale
La violation de la loi dans le secteur du numérique par des acteurs transnationaux est devenue courante et crée des distorsions de concurrence qui constituent un avantage compétitif pour leurs auteurs. A titre d’exemple, Skype, filiale de Microsoft, viole la loi sur les télécoms depuis de nombreuses années, mais il aura fallu attendre 2014 pour voir déposer une plainte : face à son refus de se déclarer comme opérateur de télécommunications alors même que l’Arcep avait saisi le procureur de la République en mars 2013. A ce jour, la décision n’a pas été rendue, mais le monde de la communication numérique retient son souffle, puisque la condamnation de Skype pourrait faire jurisprudence pour d’autres entreprises comme Viber.
Toutefois, comme le rappellent les diverses plaintes portées par les multinationales du secteur en Europe, « tout ne peut pas être mis sur le dos de la défense nationale », et faute d’alternative commercialement viable aux solutions américaines, la France sera condamnée à ne pouvoir que mettre en place un protectionnisme « par le bas » proposant des produits moins novateurs et peu stables. Seule une véritable offre concurrente pourra donc permettre à notre pays d’obtenir la crédibilité dont il a besoin pour avoir une chance devant les tribunaux européens et internationaux en cas de litige sur l’attribution d’un marché public. La solution au problème ne peut donc venir que du secteur privé, seul capable de concevoir des solutions à même de défier celles déjà en place sur des marchés ultra-compétitifs.
 
 9) Se doter  d’infrastructures numériques souveraines
La souveraineté numérique, c’est la souveraineté de la donnée. Le lieu où elle est créée, les voies qu’elle emprunte, les différents centres où elle sera ensuite stockée et donc lue sont autant de failles potentielles si les opérateurs de ces infrastructures ne se sont pas préoccupés de cette notion de souveraineté. Ceci est particulièrement vrai à l’heure du développement des plateformes Cloud toutes reliées entre elles, de la virtualisation des services et des réseaux eux-mêmes. Concernant les réseaux à haut, voire à très haut débit, il est important de continuer à développer une approche globale de couverture et de souveraineté nationales incluant la mise en place de réseaux RIP lorsque c’est financièrement nécessaire.
Dans ce contexte les initiatives médiatiques lancées par SpaceX et Google à horizon 2020 (internet par satellite à moyenne altitude performant, etc...) montrent que ces infrastructures constituent un enjeu important pour la suprématie numérique mondiale.
En ce qui concerne les infrastructures de Cloud, les grands centres de colocation opérant aujourd’hui en France sont majoritairement non-européens. Il conviendrait d’encourager et promouvoir les alternatives européennes (Iliad, TDF, CIV, Orange, etc.), notamment par le développement d’une commande publique responsable et la promotion des alternatives auprès d’entreprises.
Les opérateurs américains d’« Infrastructure As A Service » (couche infrastructure du cloud computing) dominent très largement aujourd’hui le marché français et européen (Amazon, Google, Microsoft). Cloudwatt, Dassault, Gandi, Ikoula, Numergy en France ou encore Aruba en Italie doivent se développer davantage et pour se faire, l’Etat client et les entreprises doivent être incités, formés, sensibilisés à inclure dans leurs appels d’offres des critères discriminants de souveraineté : localisation des données, tribunaux de compétence, non soumission au Patriot Act, exclusion des fournisseurs de service à la NSA, etc. 

Les propositions de la Fondation Concorde
1) Faire de la France un territoire d’excellence en matière de stockage, de traitement et de régulation de données
Les enjeux de la souveraineté numérique doivent entrer dans le débat public, intéresser le plus grand nombre, et surtout les politiques qui doivent y voir une occasion historique de restaurer un dialogue et la confiance avec les citoyens. L’Etat se doit dorénavant d’agir comme le garant de la protection de nos souverainetés individuelles et collectives, notamment face aux nouvelles intermédiations opérées par des plateformes tentées par l’exercice de nouvelles formes d’impérialisme. En facilitant le développement d’un modèle assurant aux citoyens la protection de leur données informatiques personnelles, la France a la possibilité de devenir un eldorado numérique respectueux des droits fondamentaux mais aussi et surtout un modèle international engageant une véritable redéfinition de l’activité en ligne aujourd’hui soumise, en majeure partie, au bon vouloir d’une législation américaine particulièrement conciliante avec la vente industrielle de ces parcelles personnelles. Pour cela nous proposons de définir une Constitution Européenne de l’Internet, à la manière du Marco Civil da Internet brésilien dans lequel, démocratiquement seront débattus et arrêtés les grands principes de conduite sur Internet (résidence des données, protection intégrée de la vie privée, droit à l’oubli, droit de succession, neutralité du Net, ...).
  • -  Cette Constitution sera, entre autres, le cadre intangible de négociations internationales, dont et surtout le TTIP (TAFTA) (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement). Il faudra trouver les moyens de geler les négociations sur le TTIP ainsi que la proposition de règlement européen sur le numérique afin d’imposer que le numérique soit un volet séparé du TTIP et non un paragraphe de chaque volet, comme c’est le cas aujourd’hui.
  • -  Il conviendra d’organiser la coopération franco-allemande sur ce sujet en dehors du cadre actuel de production des règlements et des directives européennes, largement perturbées par les lobbies très puissants des GAFAM à Bruxelles.
  • -  Il sera nécessaire de revoir les mécanismes de contrôle du «Safe Harbor», outil de dérogation et d’exception des sociétés américaines pour se soustraire au cadre général européen et qui n’est soumis à aucun contrôle réel puisque l’agence censée contrôlée le bon usage du Safe harbor, la FTC (Federal Trade Commission américaine) n’ayant aucun intérêt à mener cette mission.
  • -  Il faudra développer et promouvoir un label "Hosted in Europe" certifiant le respect de critères de sécurité et de souveraineté définis par un cahier des charges européen
2) S’appuyer sur des institutions publiques compétentes dans les domaines technologiques : 
La souveraineté, véritable « capacité à faire », doit se projeter sur le long terme afin d’anticiper les enjeux sociétaux, économiques et fiscaux du numérique. Cela ne pourra s’accomplir sans une formation aux questions du numérique des principaux acteurs de la vie publique, tant les élus politiques ou syndicaux, que les médias.
Les services publics, du fait de leur statut de premier prescripteur des technologies numériques en France, mais aussi par le volume des consultations, ont un rôle essentiel à jouer dans l’accompagnement des citoyens vers une meilleure maîtrise des technologies numériques. À l’instar des choix mis en place par nos partenaires européens (en particulier allemands et britanniques), la France devra se doter d’une véritable stratégie technologique à l’échelle de l’État. Ainsi, il est nécessaire de créer une fonction de responsable des choix technologiques de l’Etat, équivalent du « CTO » anglo-saxon, placée sous la responsabilité directe et au service du Premier ministre et en relation avec la DINSIC (Direction Interministérielle du Numérique, des Systèmes d’Information et de Communication de l’Etat).
Sa fonction devra dépasser les choix purement technologiques ou budgétaires et intégrer une fonction juridique propre à accompagner l’Etat dans ses choix et sa politique de sécurité technologique. 

3) S’assurer la souveraineté des compétences en créant un écosystème favorable au développement des start-ups : 

1. Par une réforme de la commande publique
Il convient de réformer le code des marchés publics, notamment la structure de ces derniers et leurs allotissements. En effet, la structure actuelle constitue non seulement un frein puissant à l’innovation, et donc à la modernisation de l’Etat, mais encore induit une discrimination qui écarte les offres des entreprises françaises innovantes, et en particulier les plus petites d’entre elles.
En modernisant sa stratégie d’achats jusqu’à la formation des acheteurs, l’Etat français, favorisera non seulement sa modernisation mais également le dynamisme et les performances de nos jeunes pousses et pourra parer à la conjoncture actuelle poussant 70% des jeunes formés en matière de numérique à imaginer construire leur carrière à l’étranger. Toutes ces propositions peu coûteuses auront de grands effets sur le développement de l’économie nouvelle.
La commande publique constitue un puissant levier pour soutenir le développement d’une filière européenne souveraine du numérique. Aussi il faut inclure dans les appels d’offres publics des critères discriminants de souveraineté : localisation des données, tribunaux de compétence, non soumission au Patriot Act, exclusion des fournisseurs de service à la NSA, etc.
Cette mesure, au-delà de son impact économique aura d’évidentes et immédiates répercussions sur la sécurité de nos réseaux et la confidentialité des communications et des données. 

2. Par une simplification et une sécurisation des dispositifs de soutien à l’innovation
L’Etat doit témoigner sa confiance vis-à-vis des PME et TPE en optimisant les aides leur étant allouées, en diminuant leur délai de versement et en clarifiant le Crédit Impôt Recherche (CIR), notamment afin d’en sécuriser l’usage pour les petites entreprises. En effet, l’actuel manque de clarté sur les conditions d’attribution et de calcul du CIR fait planer le spectre d’un contentieux sur de jeunes entreprises encore économiquement fragiles et ne disposant pas des moyens juridiques d’assurer correctement leur défense face à l’administration fiscale. 

3. Par l’institution d’un « Small Business Act » pour les TPE et PME du numérique :
Editeurs de logiciel, services en ligne, industriels du numérique,... doivent trouver en France un cadre adapté à leur activité et un terreau favorable à leur croissance. Il est urgent d’instituer un « Small Business Act » leur autorisant une plus grande agilité, notamment en matière de droit du travail et favorisant des relations équilibrées entre grands groupes et PME/TPE. Cette initiative, si elle était étendue à l’Allemagne, pourrait créer une nouvelle dynamique tout en évitant les délais d’une mise en œuvre européenne. 

4) Créer un cadre fiscal et financier favorable et développer le capital-risque en France et en Europe
Notre souveraineté dépend de la maîtrise de plusieurs couches technologiques. Cette maîtrise passe notamment par l’actionnariat et l’implantation des centres de décision d’entreprises de toutes tailles dans des domaines qui devront être considérés par l’Etat français comme stratégiques, à savoir :
  • Le développement et la production de composants électroniques,
  • Les infrastructures et cœurs de réseaux télécoms,
  • Le cloud computing,
  • Le génie logiciel dédié aux entreprises d’autres secteurs stratégiques
  • Etc.
    Or, un des piliers fondamentaux de la réussite de la Silicon Valley repose sur la qualité du financement des start-ups. Afin d’augmenter le nombre de business angels et de capital investissement national privé en France, une remise à plat de la fiscalité est nécessaire. Nous proposons la suppression de l’ISF et la mise en place d’un taux de prélèvement unique sur le capital unique (en remplacement de l’IRPP, ISF, et CSG) à 25%, ce qui nous ramènerait dans la moyenne européenne et permettrait de retenir ou d’accueillir sur notre territoire les investisseurs capables de prendre les risques importants nécessaires au financement des projets innovants. 

    5) Garantir l’indépendance des organismes chargés des normes et standards
    La protection des technologies qui sont à la base de la sécurité et de la confiance sur Internet passe par l’indépendance des organismes chargés des normes et standards de l’Internet, en particulier lorsqu’il est question des dispositifs qui assurent la sécurité des échanges. Des mesures devront ainsi être prises sans délai pour éviter que les organisations chargées d’élaborer les normes et standards de sécurité sur Internet ne soient liées ou ne deviennent dépendantes des agences de renseignement et plus généralement des lobbies de puissances privées ou publiques.
6) Accueillir le siège européen de la Fondation « Open Compute Project » à Saclay
Il existe en France, de nombreux talents et de performantes entreprises qui ont les compétences nécessaires au développement de l’Open Compute. L’installation du siège européen de la Fondation Open Compute Project et de son laboratoire européen de certification au pôle universitaire de Paris - Saclay permettrait à la France, non seulement de renforcer son poids dans la gouvernance de cette organisation mais encore de présider à la construction d’un cloud souverain européen. 

7) Ouvrir le débat public sur la frontière entre droit à l’oubli et devoir de mémoire
La décision rendue par la Cour de justice de l’Union européenne le 13 mai 2014 consacre le droit à l’oubli numérique, un droit qui tend à faire de chacun d’entre nous « le seul archiviste de son propre passé sous réserve du devoir de mémoire ». Ce droit devrait bientôt être intégré à la réforme européenne sur la protection des données. Telles sont les raisons pour lesquelles il est indispensable que l’Etat français, par l’intermédiaire de ses institutions législatives, définisse un cadre juridique garantissant, à la fois, le droit fondamental des citoyens à protéger leur vie privée et le devoir constitutif d’histoire permettant à nos sociétés de tirer les leçons de leur passé

Conclusion
Prendre en main notre futur numérique
La population française et ses gouvernants – souffrent toujours d’un grave problème de prise de conscience des enjeux liés à la souveraineté numérique, à ses dangers afférents mais aussi aux nombreuses opportunités qu’elle recèle. « L’intendance » liée à l’arrivée de nouvelles technologies doit impérativement suivre, notamment dans les administrations.
La pédagogie doit aussi s’adresser aux donneurs d’ordres, tant publics que privés, et les grands acteurs économiques doivent comprendre que face au pouvoir disruptif du numérique sur leurs modèles d’affaires, la maîtrise des technologies numériques associée à la collaboration d’un écosystème de start-up, représentent un atout majeur.
Dans cette révolution qui est en marche, résident les clés de notre avenir en tant que force économique et industrielle, mais aussi en tant que nation souveraine. Il y a urgence à insuffler, au niveau tant français qu’européen, un esprit conquérant, imposant nos règles d’un « numérique à l’européenne », respectueux des valeurs propres à nos nations. 

Lexique
Backdoor : dans un logiciel informatique, une backdoor (ou « porte dérobée » est une fonctionnalité inconnue de l’utilisateur légitime, qui donne un accès secret au logiciel.
Cloud ou Cloud Computing : un modèle qui permet un accès omniprésent, pratique et à la demande à un réseau partagé et à un ensemble de ressources informatiques configurables (comme par exemple : des réseaux, des serveurs, du stockage, des applications et des services) qui peuvent être provisionnées et libérées avec un minimum d’administration.
Cyberespace : ensemble de données numérisées constituant un univers d’information et un milieu de communication, lié à l’interconnexion mondiale des ordinateurs.
Datacenter: un endroit physique où sont rassemblées de nombreuses machines (bien souvent des serveurs) contenant des données informatiques.
“Hosted in France”/ “Hosted in Europe” : Hébergement internet en France / hébergement internet en Europe
Open Compute Project : Projet lancé par Facebook de partage des données des différents centres de données des grandes entreprises (Facebook, Microsoft, Bank of America...)
Renater : Réseau National de télécommunications pour la Technologie l'Enseignement et la Recherche Safe Harbor : les principes du Safe Harbor permettent à une entreprise de vérifier qu’elle respecte la législation de l’espace économique européen afin d’obtenir une autorisation de transfert des données. 

Fondation Concorde
6, place de la République Dominicaine 750017 PARIS

www.fondationconcorde.com


c) France: la presse judiciaire attaque la nouvelle loi sur le renseignement + Rappel faits 2015

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a été saisie d'un recours contre la loi sur le renseignement par des membres de l'Association confraternelle de la presse judiciaire (APJ).

Les 180 représentants de la plupart des médias écrits, numériques ou audiovisuels expriment leur préoccupation face à ce qu'ils considèrent comme de nouvelles menaces pour la liberté d'informer et protestent contre la surveillance de masse qu'autorise le texte entré en vigueur le 3 octobre 2015.
La loi renseignement du 24 juillet a été adoptée par 80 % des parlementaires français et validée le 23 juillet par le Conseil constitutionnel en dépit des inquiétudes formulées par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et plusieurs associations de défense des libertés numériques.
Sur son site officiel, l'Association indique que la loi en question "porte atteinte aux droits et libertés des journalistes, dont le sacro-saint secret des sources".
"L'ingérence secrète que prépare le gouvernement, par le biais d'écoutes téléphoniques ou de recueil en masse de données, aura pour conséquence d'affecter le droit à l'information de notre société démocratique. Les journalistes pourront être victimes de ces violations sans même qu'ils en soient informés puisque par nature cette surveillance et ces captations sont secrètes", avertissent les membres de l'APJ.
La CEDH, organisation particulièrement vigilante sur le droit d'informer, devra désormais examiner la conformité de la loi renseignement aux exigences démocratiques d'un Etat de droit.
Le document concerné autorise une surveillance de masse non seulement pour prévenir le terrorisme, "la criminalité et la délinquance organisée" ou "les violences collectives", mais également pour protéger "les intérêts majeurs de la politique étrangère" ou "les intérêts économiques, industriels ou scientifiques". Conformément à ses dispositions, un suspect peut être espionné et localisé grâce à son téléphone et toutes ses communications numériques.


PETITS RAPPELS EN 2015

Loi sur le renseignement: quand l’élève français dépasse le maître américain

"Au moment où les Etats-Unis reviennent en arrière sur le Patriot Act, la France s’apprête à suivre la même voie",

déplore Françoise Dumont, la présidente de la Ligue des droits de l'Homme.

Le projet de loi sur le renseignement, qui officialise notamment des techniques d'espionnage sur internet et de lieux privés, va être voté la semaine prochaine.  
Et si le Patriot Act, texte qui accorde aux services de renseignement américains de larges pouvoirs pour espionner leurs citoyens afin d'empêcher les attentats, a été bloqué au Sénat, la France voudrait s'approprier l’expérience des USA suite aux attentats du 11 septembre 2001, déjà considérée comme une erreur. 
Suite à cette nouvelle, près d'une centaine de personnes ont participé dimanche à un rassemblement devant  la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Levallois-Perret, près de Paris, pour protester contre ce projet de loi aussi controversé que scandaleux.
"Ce texte nous est vendu comme une loi pour lutter contre le terrorisme, mais en réalité il va ouvrir la porte à une surveillance extrêmement large de la population", et notamment d'"un certain nombre de militants associatifs et syndicaux", a déclaré Françoise Dumont, présidente de la LDH.
On peut constater que la France prend le relais de la Grande Bretagne qui, elle aussi, par la bouche de Theresa May, se prononce pour le renseignement, faisant passer pour la loi anti-terroriste. Le second Big brother à l’européenne ne veut pas se laisser distancer. Maintenant il n y a plus de doutes, Edward Snowden a eu raison: la NSA "continuera à espionner le monde". 
Etonnons-nous, mais M. Snowden a même été modeste dans ses réflexions, en affirmant qu' "Il ne s'agit pas uniquement de lois concrètes, le problème est ailleurs. Malgré la reconnaissance de l'illégalité et de l'inefficacité du programme de surveillance massive, toutes les branches du pouvoir américain prônent sa restitution en jouant à nouveau la carte de la menace terroriste", des projets de lois en France et en Grande Bretagne ne sont plus des cauchemars irréalistes, mais l'affaire de quelques mois ou quelques années maximum.
Toutefois, les Français ne sont pas prêts à renoncer à leur droit à la vie privée. Ainsi, Françoise Dumont se prononce contre cette loi qui " va permettre l’écoute de quasiment tous les portables … mettre des  dispositifs complètement intrusifs sur les ordinateurs … mettre des balises sur les voitures".
Pourtant, selon Mme  Dumont, "au nom de la sécurité, on ne peut pas tout faire – les pratiques illégales ne doivent pas être légalisées". Elle met l'accent sur une contradiction sur laquelle repose la loi: " Cette loi prévoit de surveiller les militants syndicaux et je ne pense pas que les militants syndicaux soient a priori des terroristes".
Quant au Freedom Act, signé mercredi par Barack Obama, rappelons qu'il limite désormais le travail des services de sécurité par rapport à la loi précédente, le Patriot Act, mais ne mettra pas fin à la surveillance américaine, a déclaré Edward Snowden lors d'une téléconférence entre la Russie et Londres organisée par Amnesty International.

Loi renseignement: 63% des Français favorables à une limitation des libertés 

Plus de six Français sur dix sont favorables à une limitation des libertés individuelles, révèle un sondage CSA, premier jour de l'examen du projet de loi controversé sur le Renseignement.

Au total, 63% sont favorables à la limitation des libertés individuelles sur internet, notamment en surveillant les données de navigation des internautes, tandis que 32% des sondés y sont opposés.
Les Français plus âgés sont plus tolérants à une restriction des libertés: près de la moitié des 18-24 ans sont contre, alors que les 65 ans et plus y sont très massivement favorables (76%).

Les termes du projet de loi, présenté par Manuel Valls lundi après-midi dans l'hémicycle, ne sont pourtant pas encore bien perçus: plus des deux tiers des Français en ont entendu parler (68%), mais moins d'un sur trois sait clairement de quoi il s'agit (27%).
Malgré l'indifférence d'une partie des Français, de nombreux observateurs constatent que le projet de loi porte gravement atteinte aux libertés et mettent en place une surveillance généralisée de la population.
Avec le projet de loi, les enquêteurs et agents pourront effectuer en toute légalité des "interceptions de sécurité" portant sur les contenus des courriels et des conversations téléphoniques, uniquement s'ils sont en lien direct avec l'enquête.
Le texte prévoit aussi le recours à de nouvelles technologies permettant aux agents de poser des micros, des balises, et des caméras espions partout où ils l'estiment nécessaire. Ils pourront également capter ce qui est tapé sur un clavier en temps réel.
L'un des points les plus controversés du texte concerne les Imsi-catchers, ces appareils qui permettent, en imitant le fonctionnement d'une antenne-relais, d'intercepter les téléphones portables, leurs données de connexion ou écouter les conversations.
Selon un éditorial publié sur Médiapart, "la loi n'est portée que par des politiques qui voient dans l'invocation des risques sécuritaires et la création d'une société de contrôle et de suspicion le seul moyen de préserver un pouvoir de plus en plus incapable de susciter une adhésion positive".

 
 

 
d) Données personnelles: l'Europe pourrait durcir le ton

Alors que les Etats-Unis tentent une conciliation avec l’Union européenne sur le sujet sensible de la protection des données personnelles, après les révélations de l’ex-agent de la CIA Edward Snowden, la Cour de justice de l'Union européenne s’est attaquée aux accords "invalides" avec les Etats-Unis.

En cause: la collecte "à large échelle" pratiquée par Washington dans le cadre du Safe Harbour qui permet aux entreprises américaines d'hébergeraux Etats-Unis les données des citoyens européens. Pour Yves Bot, avocat général de la Cour de justice, la surveillance exercée par les services de renseignement outre-Atlantique est "massive et non ciblée", ce qui présente une violation des droits fondamentaux. Les 28 Etats membres devraient être en droit de suspendre le transfert des données des utilisateurs européens de Facebook vers les Américains.
Henry Temple, spécialiste en droit économique, et Marc Lempérière, avocat, dégagent des pistes d'analyse pour l'agence Sputnik.
"On sait que depuis déjà une vingtaine d'années le système Echelon observait non seulement les conversations, les fax et les courriels des supposés terroristes, mais également les conversations des hommes d'affaires, des simples citoyens et des hommes politiques. Maintenant, il faut rajouter à cela un programme d'espionnage que les Américains appellent le programme Prism et qui consiste à écouter et même à ficher tout le monde. C'est scandaleux! Il s'agit d'une atteinte également aux droits des consommateurs et pas seulement des citoyens. Quand j'utilise Google, Gmail, Yahoo ou d'autres systèmes, je les utilise en tant que consommateur, et le consommateur doit exiger qu'on mette fin à ce système d'espionnage. Avec dommages intérêts à la clé", a indiqué M. Temple.
Les approches de la vie privée sont diverses. Pour le Vieux Continent, la totalité de la vie privée et de la vie professionnelle sont des choses sacrées. En France, la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, remonte à 1978, même si elle a été modifiée depuis. Les Américains, eux, se contentent du privacy qui, d'après Henri Temple, "n'a rien à voir avec la vie privée. Ils ont purement et simplement arrangé le concept pour pouvoir continuer à espionner et fouiller dans la vie privée des gens".
L'étau se resserre sur la décision de la Cour de justice de l'Union européenne. Même si les avis de l'avocat général ne l'orientent pas entièrement, ils sont généralement suivis par la Cour. En matière de données personnelles, les Etats membres ne peuvent pas prendre des mesures au niveau national. Voici un exemple flagrant. Le nouveau règlement européen a été adopté en juin, bien que tous les pays ne prônent pas la suppression des données personnelles sur demande d'un utilisateur.
En attendant la décision de la Cour de justice de l'Union européenne, fin octobre au plus tard, Henri Temple lance un appel aux Européens: 

"Les Américains se sont à eux-mêmes accordés le droit de plaider les contentieux chez eux. C'est une compétence universelle. Faisons la même chose. Internet, c'est l'ubiquité. Une infraction commise sur Internet est commise partout. On a le droit de saisir avec efficacité les tribunaux européens. Vu le nombre de victimes d'espionnage, les sommes qu'aurait à payer le gouvernement américain s'élèveraient à des milliards, des dizaines de milliards de dollars. Il faut attaquer le gouvernement américain sur ce qu'il craint le plus, c'est-à-dire la condamnation financière. Il faut se battre, se défendre. Les Américains sont en train de mettre en place une sorte de dictature mondiale. Il faut la refuser". Avis partagé par Marc Lempérière: "Avec 500 millions de consommateurs, l'Union européenne est plutôt bien placée pour imposer le contrôle et le respect de ses lois, ce qu'elle est en train de faire avec la réforme du règlement de protection des données. D'après la réforme, on va arriver à des amendes de 2%-5% du chiffre d'affaires mondial. Les Google, Facebook, Amazon et Apple vont commencer à réfléchir".
 Valérie Smakhtina

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